Histoire et patrimoine

L’Histoire de Thairé se perd dans la nuit des temps, puisque déjà habitée à la préhistoire comme l’attestent certains vestiges. Puis le bourg s’est développé à travers les âges au gré des paroisses auxquelles il appartenait, et des seigneurs qui y vécurent. Les rues du bourg ancien se souviennent aussi de la présence des Templiers et des Hospitaliers dont il reste des traces, pour qui sait les déceler…

Les guerres, anciennes ou plus récentes, ont également meurtri le village, tout comme les famines, les épidémies.. 
Mais le village, dominé par son donjon fortifié du XIVème siècle, inscrit au répertoire des monuments historiques, a aussi connu de grands bonheurs, des années fastes, même si le labeur y était dur.

▼Pour aller plus loin

Les temps anciens (du moyen-âge aux temps modernes)

Les premières mentions écrites actant l’existence de Thairé («Tairé» ou encore «Tayré») datent du début du IXème siècle.

Le récit légendaire du Traité de la révélation de Saint-Jean sur la bataille qui opposa les Vandales (Normands ou Sarrazins) à Pépin, roi d’Aquitaine, situe cette épopée sur le plateau entre Mortagne-la-Vielle (aujourd’hui rattachée à Thairé) et Mortagne-la-Jeune (lieu-dit de Salles-sur-Mer), ces deux localités étant alors connues sous leur nom latin «Mauritania». Au milieu du plateau se trouve le lieu-dit Barbaran qui localise le campement des Vandales, l’armée de Pépin étant à Voutron. Le lieu-dit Les Mottes au sud de Saint-Vivien rappelle quant à lui le lieu d’ensevelissement de ceux qui furent tués au cours du combat. Enfin le nom du lieu de Roncevaux prés de Salles-sur-Mer aurait pu être inspirée d’une autre bataille …

Thairé fut fortement marquée par la présence de l’ordre des Templiers. Après son abolition le 18 mars 1314 par le roi Philippe Le Bel, les domaines et les maisons de cet ordre furent donné à l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, appelé aussi Ordre des Hospitaliers. Ce fut le cas des possessions seigneuriales telle que le Fief de Dirac.

Les guerres de religion n’épargnèrent pas le village. La doctrine de Luther et de Calvin se répandit rapidement en Aunis à partir de 1540. Les signeurs de Dirac, la Garde-aux-Valets, Mortagne, Voutron se convertirent au protestantisme. Les deux tiers de la population de Thairé devinrent protestants (600 huguenots).

En 1573, après le massacre de la Saint-Barthélemy, le roi Charles IX et la reine mère Catherine de Médicis ordonnent le premier siège de La Rochelle afin de soumettre définitivement les protestants à leur autorité. Face à la résistance des protestants le siège est levé le 8 juillet. Les négociations de paix ont été menées à Thairé dans la maison de Jean Coyttar, huguenot médecin, astrologue et astronome. Des noms de rues actuelles rappellent cette période : rues Coyttar et Trêve de La Rochelle.

S’ensuivit toutefois une période difficile pour Thairé et ce jusqu’à la fin du siège de La Rochelle par le Cardinal Richelieu en 1628. Le village fut à maintes fois occupées par les troupes royales qui démolirent la majeur partie des maisons du centre-bourg, les habitants devant contribuer à l’entretien des troupes de cavalerie cantonnées à Aigrefeuille.

En 1654 la Châtellenie1 et la Commanderie de Thairé étaient rattachées à Jacques Fraineau de Marigny2, Commandeur de Bourgneuf et du dit « Tairé » son annexe.

Des terrains en bordure du Pontreau et des bois de Bouribeau appartenaient au Marquis de Saint-Georges, attaché à l’Ordre des Hospitaliers. La famille de Saint-Georges est originaire de la Marche, ancienne province dont la capitale est Guéret, préfecture du département actuel de la Creuse. Sa présence à Thairé est certainement celle de sa branche cadette de Marsais.

Blasons d’argent à chevron ou croix de gueules3

Thairé Blason Marquis de Saint-Georges
Thairé Blason Jacques Fraineau de Marigny,

Marquis de Saint-Georges

Jacques Fraineau de Marigny

  1. Châtelellenie – Ce terme du moyen-âge désigne l’unité la plus petite du découpage administratif. Dès le Xième siècle en France, elle représente un territoire nouveau formé autour de châteaux à mottes sur lequel le maître du château exerce ses droits. ↩︎
  2. Originaire du diocèse de Tours et ordonné Chevalier de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem en 1612. ↩︎
  3. Gueules – Une des cinq couleurs des blasons représentée en émail par le rouge. ↩︎
Si l’histoire du bourg vous passionne, vous pouvez la retrouver en détail dans l’excellente monographie de Norbert Estève, «Thairé, Histoire d’une commanderie Hospitalière» disponible à la Bibliothèque.

L’époque contemporaine (du XIXe au XXIe< siècle)

La commune, telle qu’elle est conçue de nos jours, est née de la Révolution de 1789, la loi du 14 décembre de la même année votée par l’Assemblée nationale Constituante fixant la réorganisation administrative de la France. A partir de cette date la commune devient la cellule administrative de base.

La commune est alors administrée par un conseil général rapidement appelé conseil municipal. Il est élu pour deux ans et renouvelable par moitié tous les ans. Les électeurs sont les citoyens payant l’équivalent de dix journées de travail comme impôt direct. Le nombre de conseillers varie de 6 à 42 en fonction du nombre d’habitants. Le conseil désigne un bureau municipal (ou municipalité) de 3 à 21 officiers municipaux agissant également en tribunal de simple police. Parallèlement les électeurs élisent un maire pour deux ans et rééligible.

Le conseil municipal a des attributions étendues. Il peut acheter ou vendre des immeubles, décider d’impôts extraordinaires ou des emprunts. Il décide des dépenses locales et des travaux. Le bureau municipal gère les biens de la commune, il est chargé de la répartition et de la perception des impôts directs dus à l’État. Il peut fixer le prix de la viande et du pain (la taxation). Il peut demander le secours de la « force publique », soit l’armée soit la garde nationale et proclamer la loi martiale en faisant déployer le drapeau rouge en tête des forces de l’ordre.

Une des décisions les plus importantes qui a marqué la vie du village concerne la réunion de Mortagne-la-Vielle avec Thairé, actée par une ordonnance du 6 décembre 1827. 

La Mairie actuelle

C’est au début des années 1830 que la mairie actuelle commence son histoire, longue et riche de multiples rebondissements.

Ainsi le 15 avril 1833 une ordonnance royale autorise la mairie à imposer extraordinairement une somme de 1 200 francs [3 144 euros en 2021] pour subvenir aux travaux de construction d’une mairie, d’un corps de garde et d’une prison.

En 1858 une fontaine est érigée côté sud de la mairie, sur ce qui deviendra un temps la place de la Fontaine.

Le souvenir de cette pompe s’est perdu, seuls subsistent le plan de sa construction et le nom donné à deux rues du centre bourg, la rue de la Place et la rue de la Fontaine.

Quant à la place de la Fontaine, celle-ci est devenue un parking desservant la mairie et la bibliothèque municipale.

Le destin des Halles de Thairé suit le même parcours en connaissant un déclin à petit feu. De nos jours ne subsiste que la rue des Halles qui permettait d’accéder aux Halles en venant du Château de Dirac.

L’annonce de cette construction suscita rapidement une réaction de la part des habitants. Ainsi le 30 juillet 1833 le sous-préfet demande au conseil municipal de rendre un avis sur une pétition publique. Dans cette pétition le sieur Julien Joubert, Boucher demeurant à Thairé, expose que la construction des bâtiments dans une partie des halles, lui cause un grand préjudice en ce qu’elle le prive de la vue que sa maison a sur les halles, et du droit d’étal dont il jouit.
Malgré cette pétition, la construction se réalisera durant les années suivantes, marquant ainsi le déclin à petit feu des Halles de Thairé.


Des réaménagements successifs se poursuivent. Par une délibération en date du 15 septembre 1912, le conseil municipal décide de réaménager la mairie et Jean Musset, architecte situé à La Rochelle, en établit les plans selon une configuration ayant peu évoluée de nos jours.

Pour pouvoir réaliser ce projet un emprunt de 20 000 francs [52 600 euros en 2021] est alors engagé auprès du Crédit Foncier de France pour une durée de 30 ans (jusqu’en 1943) et un coût global de 33 897 francs [89 150 euros en 2021].

L’évolution de la Population

La première partie du XIXéme siècle est marquée par les guerres Napoléoniennes du premier empire (1804-1815). L’essor de la population de Thairé est stimulé par la reprise économique qui suit la Seconde Restauration (1815-1830) sous le règne de Louis XVIII, grâce notamment à la culture de la vigne, mais ralentit durant la Monarchie de Juillet (1830-1848) instaurée suite aux émeutes des « Trois Glorieuses ». La croissance démographique reprendra nettement durant la première partie du Second Empire (1852-1861) avant de connaitre une baisse inexorable.

Thairé - Evolution de la population depuis 1793
Evolution de la population depuis 1793

Deux phénomènes entrent alors en jeu, de graves épidémies de choléra et le début de l’exode rural qui voit les populations rurales s’implanter dans les zones urbaines. Cet exode rural se poursuivra les décennies suivantes, accentué par la crise du phylloxéra, maladie détruisant la vigne au début des années 1880, la population atteignant en 1911 son plus bas niveau depuis le début du XIXe siècle.

La période qui suit, de 1911 à 1946, marquée par deux guerres, Thairé, comme l’ensemble du département, est frappée par l’hécatombe de 1914-1918, la stagnation de l’entre-deux guerres et la reprise de l’exode rural. La période de reconstruction qui suit la seconde guerre mondiale (1946-1962) entraine une légère croissance démographique.

L’attrait du littoral au début des années 1980, le vieillissement de la population la décennie suivante, font que le solde migratoire devient positif, la population de Thairé suivant depuis une courbe ascendante, fortement accentuée au début du XXIème siècle avec l’implantation de nouveaux lotissements.

Au travers des guerres

De tout temps, Thairé a payé un lourd tribut aux guerres que notre pays a connu. Dès les guerres napoléoniennes, nombreux furent les enfants de Thairé à quitter le village.

En 1852 la commune recense encore six vieux serviteurs de l’Empire auxquels, parmi tant d’autres, le Prince Louis Napoléon, lors de son passage à Rochefort, alloue un secours exceptionnel. Si le montant de 20 francs semble dérisoire, il faut rappeler que le salaire journalier d’un ouvrier agricole était de 1,70 francs, et que ½ kilo de pain blanc coutait 0,22 francs.

Toujours en 1852, la commune comptait dans sa population trente-et-un anciens militaires de la République.

La commune porte alors une attention particulière au souvenir des fils de Thairé qui ont participé aux différentes guerres. En 1920 la mairie décide d’ériger un monument aux morts à la mémoire des enfants de la commune morts pour la France au cours de la première guerre mondiale dans le cimetière de Thairé, suivi en 1921 par celui de Mortagne.

Terminés en 1923, la mairie investit au total dans les deux monuments aux morts de la commune la somme de 13 500 francs [10 000 euros en 2021].

A l’issue de la seconde guerre mondiale, la mairie mandate la somme de 1 000 francs [220 euros en 2021] pour chaque prisonnier de guerre (au nombre de 25) et réquisitionné dans le cadre du service du travail obligatoire – STO (au nombre de 7).

La mairie participa également activement à l’amélioration du sort des Victimes de guerre en portant la vente des insignes des Bleuets de France dont le produit sert à secourir les orphelins, les veuves et les ascendants des deux guerres mondiales.

Église Notre-Dame de l’Assomption

Construite au cours des XIVème et XVème siècle l’église Notre-Dame de l’Assomption doit sa renommée à son clocher fortifié. De forme carrée, cantonné d’épais contreforts, il est surmonté d’un dernier étage octogone comprenant un petit clocher-pignon et une arcade, l’ensemble étant daté du XVIIème ou XVIIIème siècle.

L’entrée de l’église est constituée d’un portail de style gothique flamboyant.

Les fortifications se remarquent par ses doubles machicoulis à arcade à l’avant, ses machicoulis à modillons sur les côtés et son échauguette d’angle.

Conçu pour la défense, le clocher-donjon témoigne de l’architecture militaire du XIVème siècle, ce qui lui valut d’être inscrit à l’inventaire des monuments historiques le 27 février 1925.

Subissant les bombardements de la seconde guerre mondiale et atteint par un obus en 1945, le clocher fut sérieusement endommagé. Il fut reconstruit en 1954, tel que nous le connaissons aujourd’hui avec sa flèche d’ardoises.

Thairé - ancien donjon
Thairé Tableau église Allégorie de la Religion ou la Religion triomphante

Allégorie de la Religion ou la Religion Triomphante

Thairé église de Mortagne

L’ancien village de Mortagne possède toujours son église dans laquelle il est possible de voir une maquette de « L’Aimable Françoise », navire ayant pris part aux expéditions négrières françaises au XVIIIème siècle.

Cet ex-voto daté du XIXème siècle a été placé en ce lieu soit en accomplissement d’un vœu soit en signe de reconnaissance …

Thairé église de Mortagne ex-voto maquette de l'Aimable Françoise

L’Aimable Françoise fit deux voyages à partir du port du Havre à destination de Saint-Domingue (Haïti) et de Cayenne (Guyane). Son dernier voyage date de 1776 à partir du port de Nantes et à destination de Port-au-Prince (Haïti) où il fut vendu le 8 avril 1777.

Le Baloir

Cet aménagement en brique et bois, daté du XVème siècle, garde tous ses secrets.

À l’origine cette pièce communiquait avec la maison du maréchal-ferrant, assumant également le métier de forgeron, se trouvant à sa droite.

Le commis du maréchal-ferrant dormait dans cette pièce dans laquelle était également entreposé des grains de céréales (avoine, blé…). Ce grenier ainsi surélevé et avec des parois ajourés assurait une meilleure ventilation, une meilleure dessication des céréales et les protégeait des rongeurs.

On retrouve cette origine dans l’étymologie du terme baloir. A cette époque l’Aunisien et le Saintongeais étaient des dialectes de la langue poitevine-saintongeaise faisant totalement partie de la famille des langues d’oil, tout comme le français. Ainsi dans le glossaire de la langue d’oil de 1891, parmi les vieux mots français hors d’usage, certains prennent tous leur sens. Le verbe « baler » signifie vanner. Or après avoir avoir fait sortir le grain de céréale de sa « balle » ou « bale » (enveloppe du grain), par exemple en frappant les gerbes contre les parois, le vannage est l’action qui permet de séparer la grain de la paille à laquelle il est mêlé. Le verbe « baloïer » signifiait balloter, flotter, voltiger et le substantif « balois » décrit la criblure d’avoine. Enfin le substantif « oir » s’écrit également « air ». Séparer la bale du grain d’avoine en faisant voltiger le grain à l’air est certainement une définition imagée du terme baloir.

Cette méthode permettait de se passer d’outils et de ne payer aucune taxe. De plus le maréchal-ferrant trouvait ainsi le moyen de conserver des grains et de les égrener selon les besoins, le tout à moindre coût si ce n’est le temps de travail du commis.

Lorsque qu’un cavalier arrivait tard dans la nuit, il pouvait frapper le dessous du baloir pour réveiller le commis qui s’empressait à sont tour de réveiller le maréchal-ferrant. Ce dernier descendait rapidement pour démarrer le feu de sa forge si nécessaire. Les chevaux étaient attachés à des anneaux, aujourd’hui disparus, fixés dans le mur de la maison. Seul l’emplacement de la porte de la forge se devine. Le commis soignait alors les montures avec la paille et les nourrissait avec les céréales dont il disposait.

Au cours des siècles cette pièce a également servi de logement aux ouvriers boulangers du four banal de la commanderie puis à divers commis.

Le Baloir a intégré la patrimoine communal en 1984 à la suite d’une donation de la famille Demail.

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